Mais nous nous la posons et elle n'a rien d'anecdotique. Depuis quelques semaines, en effet, nous publions régulièrement le palmarès par région (édité à l'origine par le Figaro Entreprises avec le concours de la Coface scrl) qui estampille les sociétés les plus dynamiques, tous secteurs confondus, présentant des chiffres d'affaires et des résultats en progression sur les cinq derniers exercices. Dans ces listes régionales, il y a (heureusement) des entreprises de transport, une ou plusieurs selon les endroits. Entreprises que L'Officiel des Transporteurs (en citant la source) met à son tour en exergue dans ses colonnes. Or la reprise de l'information nous a valu, à plusieurs reprises, les reproches, voir le courroux, des chefs d'entreprise consacrés par les palmarès. Motif : être montré comme des PME dynamiques et profitables apporte plus désagréments que d'avantages. Autre raison, autrement plus nauséabonde : il serait demandé, aussi sec, à ces entreprises valeureuses une révision de leurs tarifs ou conditions commerciales. « Des chargeurs ne supportent pas de nous voir gagner plus d'argent qu'eux. A la lecture de ces chiffres, ils font pression sur nous », explique, amer, un dirigeant, très enclin à cacher les ressources de sa société. Le constat est implacable. Le monde du transport, et d'abord les PME, doivent-ils faire pitié pour mieux se vendre ? On peut penser qu'une entreprise atteint sa majorité quand elle est capable de faire savoir publiquement qu'elle gagne de l'argent. On peut aussi croire que les clients et chargeurs, qui abusent de leur position, auraient tort de considérer qu'un transporteur en mauvaise santé financière est un bon opérateur. On peut enfin être tenté d'affirmer qu'une épidémie de bons bilans dans le transport routier ne serait pas mortelle pour ceux que la profession sert.
Editorial
