Dans un climat économique tendu et imprévisible, l’inflation continue de peser sur l’ensemble des secteurs. Et le TRM ne fait pas exception. Les 38 000 sociétés de transport restent confrontées à une hausse persistante de leurs charges. Ce que confirme le Comité National Routier. Comme chaque année, le CNR a passé au crible les coûts d'exploitation du transport routier de marchandises pour 2025. Et le constat est sans appel : ils poursuivent leur progression. Les résultats dévoilés à l’occasion de Solutrans montrent que l’inflation hors carburant atteint une hausse de 2,4 %, soit plus du double de l’inflation générale, malgré l’accalmie sur les carburants. Cumulée sur deux ans, elle s’élève à 7,7 %.
Les principales hausses concernent notamment les coûts salariaux du personnel de conduite, poste de dépenses n°1. Si les minima conventionnels salariaux servant de référence pour calculer les indices de coût de personnel de conduite du CNR n’ont pas évolué en 2025, néanmoins, certaines entreprises ont pratiqué des revalorisations salariales volontaires. « Nous notons une évolution salariale annuelle de 0,6 %, liée à l’effet GVT (Glissement Vieillissement Technicité) », observe Olivier Raymond, chef statisticien au sein du CNR.
Pour 2026, le CNR annonce une inflation comparable, autour de 2,4 % hors carburant, avec un enjeu central : l’évolution des salaires et indemnités des conducteurs, encore en négociation à ce jour. Alors que la réforme des allègements de charges sociales programmée en 2026 pourrait alourdir davantage les coûts salariaux.
Carburant : un facteur incertain qui limite les projections
Autre facteur passé au crible : le carburant. « Le gazole et le GNV restent trop volatils pour faire l’objet de prévisions fermes dans le rapport », tient à souligner le CRT. Mais si l’on regarde de plus près les tendances actuelles, l’on constate que le gazole professionnel recule de 5,3 % en moyenne en 2025. Le GNV baisse lui de 9,6 % en glissement annuel, après un début d’année haussier (+ 8,5 %) puis un net repli (- 16,7 %) entre mars et septembre.
Pour 2026, le CNR ne fixe pas de scénario chiffré mais « il n’est pas prévu d’évolution de la fiscalité en l’état de la connaissance actuelle », rassure Olivier Raymond.
Perspectives 2026 : prudence et vigilance recommandées
Plusieurs composantes devraient continuer à augmenter. A commencer par les salaires. Selon le CNR, la projection fait l’hypothèse d’une hausse de 1% « en raison de l’inflation prévue en 2025 », poursuit Olivier Raymond. Alors qu’une hausse des cotisations employeurs, votée lors de la loi de finances 2025 et confirmée par un décret de septembre, est à prévoir l’année prochaine. « Au 1er janvier, il n’y aura plus qu’un allègement de charge au lieu de trois. Et ce nouveau système de calcul des allègements va se traduire par une inflation importante des coûts sociaux (salaires + charges) de l’ordre de 0,6% », explique-t-il. Finalement, « la prévision d’augmentation et d’inflation des coûts sociaux est d’environ 2,2% pour l’année prochaine ».
Le CNR s’est également intéressé aux coût de matériel. « Les coûts d’assurance ont explosé depuis deux ans. En moyenne, l’augmentation atteint 6,1% en 2025. » Les prix des véhicules sont quant à eux restés stables. Une tendance qui devrait se poursuivre en 2026 alors que les taux d’intérêt devraient eux augmenter de 0,3 point, d’après la Banque de France. Par ailleurs, le Comité National Routier retient une augmentation plus marquée de 2,3% des coûts d’assurance pour 2026. En somme, selon ses prévisions, le coût fixe de matériel devrait progresser d’environ 3,5 %.
S’agissant de la maintenance, l'indice progresse de 2,5 % en moyenne annuelle. « Les coûts d’entretien augmentent de 3% en un an sous l’effet de l’inflation des charges d’entretien-réparation et de la hausse du coût de personnel d’atelier. Alors que les coûts des pneumatiques sont stables », poursuit Olivier Raymond. Ce dernier explique que le contexte très incertain sur le marché des matières premières rend difficilement prévisibles les variations futures des prix des pièces et des pneumatiques. Sous ces conditions, le CNR retient une hypothèse d’augmentation de 2% sur la maintenance.
Et alors que les prix des péages ont augmenté de près de 1 % en 2025, le CNR prévoit une hausse de 0,9% l’année prochaine sachant que les prochaines revalorisations tarifaires sont attendues pour février 2026.
Charges de structure : à ne pas négliger
Depuis un an, force est de constater que les charges de structure augmentent en moyenne de 1,9 %, sous l’effet conjugué des hausses des coûts de personnel sédentaire et administratif (+ 1,6 %), de coûts des locaux (+ 2,1 %) et des coûts des services (+ 2,2 %). Cette tendance haussière devrait se poursuivre pour 2026, à +2,2%.
Crédit photo : Source : CNR
Le CNR insiste sur la nécessité pour les entreprises d’intégrer ces évolutions dans leurs calculs de prix et dans leurs discussions commerciales. « Ces chiffres sont un point de départ pour partir en bataille contre nos clients qui sont souvent rotors à l’idée d’augmenter les prix. Nous allons confronter nos chiffres aux évolutions du CNR. Puis nos équipes commerciales vont partir en croisade à la recherche de quelques pourcents d’augmentation auprès de nos clients. C’est souvent un bras de fer. Chez nous, nous essayons de développer l’idée d’un partenariat plutôt que de la relation client-fournisseur, ce qui aide », témoigne de son côté Julie Lee-Quil, présidente des Transports Quil (400 véhicules - 300 collaborateurs).
Face à la hausse des coûts fixes et à une demande atone, les transporteurs devront poursuivre leurs efforts d’optimisation, moderniser les flottes et s’appuyer sur les mécanismes d’indexation pour préserver leur rentabilité. L’année 2026 s’annonce donc encore délicate : incertitude énergétique, réforme sociale, inflation persistante sur les charges. Dans ce contexte, l’agilité financière et la capacité d’adaptation seront plus que jamais des facteurs clés de résilience.