Après dix semaines de discussions, la conférence sur le financement des transports a débouché sur 14 propositions pour poser les fondations d’un nouveau modèle de financement des transports. À partir de ce rapport, un projet de loi-cadre en deux parties sera porté au parlement par le gouvernement. Des discussions seront engagées avec les députés et sénateurs à partir de septembre pour définir le texte du premier jalon qui portera sur les grandes orientations et qui devrait être déposé d’ici la fin de l’année. Le second jalon permettra de fixer une trajectoire d’investissements précis.
Concessions d’autoroutes
Parmi les propositions avancées dans le rapport, la première concerne les concessions d’autoroutes qui arrivent à échéance entre 2032 et 2036. Si le gouvernement opte pour un renouvellement du modèle des concessions, il entend aussi renforcer le contrôle de l’État, mettre en place des périmètres plus réduits et des durées plus courtes, avec des clauses de revoyure tous les cinq ans. Les péages resteront en place, avec une part des recettes qui ne serait pas distribuée aux actionnaires, mais réservée à l’entretien des infrastructures. Elle permettrait non seulement de financer l’entretien et l’adaptation des autoroutes, mais aussi de contribuer à l’entretien et au déploiement d’autres réseaux (ferroviaire, routier non concédé, fluvial), dans un principe de solidarité avec les réseaux d’autres modes qui ne disposent pas de ressources équivalentes. Le rapport estime les recettes associées à ces nouvelles concessions à 2,5 milliards d’euros par an à terme, avec un fléchage vers les investissements de transports.
TICPE, ETS 2 et Écotaxe régionale
Deux mesures, déjà inscrites dans la loi Climat et résilience et qui concernent directement le TRM, sont évoquées par le rapporteur. La première est la suppression progressive du taux réduit de taxe sur les carburants (TICPE) accordée aux transporteurs routiers, qui permettrait de dégager environ 1,2 milliard d'euros par an à horizon 2030, selon une estimation du rapporteur. Sur ce point, le rapport rappelle la mise en place d’ETS 2 à partir de 2027, mesure qui « devrait coûter environ 5,2 Md€ par an entre 2027 et 2030 au secteur routier ». Il préconise une substitution « d’une partie de la TICPE par la mise en œuvre d’ETS 2 » car la « baisse du rendement de la TICPE, amorcé avec l’électrification du parc et la baisse de la consommation de carburant, pourrait [ainsi] s’accroître encore plus rapidement ». Il est également proposé de faciliter le déploiement de l'écotaxe régionale : « l’expérimentation de deux écotaxes locales dans le Grand-Est pourrait aussi jouer un rôle, alors que d’autres collectivités territoriales réclament des mécanismes similaires. Nous pensons qu’il n’est pas opportun de grever davantage ce secteur déjà très contributif par de nouvelles taxes, sauf si la recomposition en cours de la taxation du secteur amenait à une forte baisse des rendements. En tout état de cause, les expérimentations en cours sur l’écotaxe méritent d’être soutenues et évaluées car elles constituent une opportunité de rendements locaux intéressants. »
Rôle des chargeurs
Concernant l’aide à l’électrification des véhicules des transporteurs routiers, en complément des aides à l’acquisition déjà mises en œuvre via les certificats d’économie d’énergie (CEE), la conférence propose d’amplifier les contributions de « l’ensemble des parties prenantes des chaînes logistiques, […] en particulier les chargeurs », par plusieurs dispositifs, « incitatifs ou contraignants ». Les chargeurs pourraient par exemple définir un objectif progressif favorisant l’usage de véhicules électriques afin de garantir aux transporteurs une demande croissante pour ce type de prestation, sécurisant ainsi leurs investissements dans des camions électriques.
Parmi les autres mesures préconisées figurent notamment l'augmenter des taxes sur les voitures, la création d'une taxe sur la livraison de colis à domicile en zone urbaine, qui serait assise sur le chiffre d'affaires des plus grandes entreprises de commerce en ligne, ou encore la création d'une taxe temporaire de 2% sur certains billets de train.
Dette grise
Au cours de la présentation du rapport, le ministre a par ailleurs évoqué la « dette grise », c’est-à-dire les surcoûts d'entretiens d'infrastructures usées et non rénovées, concernant le réseau routier. Or, les différentes mesures proposées dans le rapport ne pourront pas s’appliquer rapidement et un financement urgent estimé à 1,5 Md€ serait nécessaire pour résorber cette dette. « Nous combattrons pour l’instant au niveau du PLF afin d’apporter un financement supplémentaire, » a indiqué Philippe Tabarot, rappelant toutefois que le gouvernement est en recherche de fortes économies de budget.