Nous subissons la concurrence accrue des transporteurs français partis s'installer au Luxembourg. Lesquels pratiquent des prix inférieurs aux nôtres de 5 à 10 %. » Le constat de cette dirigeante d'entreprise de la Moselle (à lire dans les pages indicateurs) vaut-il avertissement ? Dans une Europe ouverte mais non harmonisée, il n'est que le reflet d'une réalité non mesurée et d'une tendance non dissimulable. Enclenché au plan mondial, le phénomène des « délocalisations » l'est aussi dans les frontières de l'Europe et sensiblement aux frontières de l'Hexagone. Gourmand en main d'oeuvre et solide contributeur au plan fiscal, le secteur du transport, dans une logistique pan européenne, est directement concerné par le mouvement. Lequel s'impose aux grands groupes comme aux PME (en cela, c'est assez nouveau), comme l'ont confirmé Alain Fauqueur et Alain Bréau, coprésidents de TLF, lors d'un point de presse. Les facteurs incitatifs sont bien connus : recherche d'une main d'oeuvre « meilleur marché » dans le cadre du ratio coût/compétences, besoin de disposer d'une réglementation sociale plus souple et d'une fiscalité plus favorable. Quand il n'est pas imposé par un client, le choix d'investir hors de l'Hexagone, d'implanter des sites, voire de changer de domiciliation, relève du critère financier immédiat. « Nous sommes dans un processus de délocalisation qu'il n'est pas possible d'arrêter », confessait, en janvier, le commissaire européen aux entreprises et à l'industrie, Gunther Verheugen, face au nouvel ordre industriel en marche. Tous les transporteurs victimes de la « double peine » (charges plus importantes et, par ricochet, perte de frets et de clients) et qui ont les moyens de « passer la frontière » n'auront pas toujours les mêmes scrupules que les rares dirigeants qui refusent toute délocalisation pour des raisons morales. Dans les années 90, les stations-service avaient disparu du paysage français à l'approche des frontières ? En dira-t-on autant des PME du transport dans les années 2000 ?
Editorial
