Même si les conditions météorologiques qui ont refroidi l'Europe expliquent en partie ces cotations, la tendance d'un gazole cher (0,82 euro HT début mars) se nourrit d'un phénomène durable qui conjugue, nous dit-on, perturbation de l'offre, saturation des capacités de raffinage et achats massifs des pays émergents. Le prix du gazole met sans échappatoire nombre d'entreprises de transport au pied du mur, qui voient le poste carburant « polluer » leurs comptes d'exploitation et dégrader ce qu'il reste de marge pour une majorité. Il oblige le dirigeant d'entreprise à se tourner sans exclusive vers trois interlocuteurs. Le client d'abord, à qui il faut faire entendre que la hausse des prix du transport n'est pas le fait d'une mauvaise gestion mais imposée par des circonstances exogènes. Plus facile à écrire qu'à faire comprendre aux donneurs d'ordre mais il n'y a pas d'autre alternative que d'enfoncer le clou. Les pouvoirs publics ensuite méritent d'être interpellés. L'action est d'autant plus justifiée que la récupération de la TIPP, depuis le 1er janvier, est moins favorable que celle appliquée en 2004. L'État ne pourra pas indéfiniment prétexter le plan de Robien pour mieux ignorer d'autres pistes. Il y a enfin le fournisseur. La très belle santé financière des compagnies pétrolières, qui ont dernièrement affiché des résultats mirobolants (les cinq premiers groupes mondiaux, dont Total, ont en 2004 engrangé 85 milliards de dollars de bénéfices, contre 58,7 milliards en 2003), n'a échappé à personne. Fournisseurs intransigeants, les pétroliers gagnent sur tous les tableaux. Une question les a, paraît-il, agités : que faire des profits records ? Voilà le « problème » qu'un transporteur n'aura jamais à se poser tant que le prix du baril volera de sommet en sommet.
Editorial