L’été dernier, la nouvelle fit l’effet d’un coup de tonnerre dans la profession en Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca). Le 11 juillet, les responsables régionaux des fédérations apprennent que la ville d’Avignon projette de fermer, à titre expérimental pour un an, la rocade Charles de Gaulle aux véhicules de plus de 38 tonnes, de 7 à 19 heures. « Par voie de presse ! s’insurge Jean-Marc Montagnac, secrétaire général de l’OTRE Paca. Nous n’étions même pas informés alors que cet arrêté risquait de pénaliser en priorité les transporteurs de marchandises locaux, et non le transit, comme le prétendait la mairie! »
Un projet « contre-productif »
Le projet semblait aussi « contreproductif, poursuit Nathalie Lutman, secrétaire générale de la FNTR Sud Provence-Alpes-Corse. La ville d’Avignon s’était en effet opposée à la liaison Est-Ouest, Leo, pourtant validée par tous, et qui pouvait désengorger la rocade. Sur la rocade, de surcroît, les poids lourds ne représentent que 3,5 % du trafic. Et la mairie annonçait vouloir lutter contre une mauvaise qualité de l’air, mais son arrêté aurait visé tous les véhicules, même ceux qui roulent aux énergies propres… Une injustice ».
Par ailleurs, enchaîne à son tour Jean-Luc Delabre, secrétaire général de TLF Méditerranée, « le projet de la municipalité menaçait les entreprises locales par des surcoûts logistiques, déplaçait la circulation vers des axes secondaires plus fragiles. Et allait à l’encontre du report modal, puisque la rocade dessert aussi le terminal de transport combiné de Champfleury. Résultat : 450 camions/jour qui circulent aujourd’hui par le rail risquaient de revenir sur la route, menaçant la filière du transport combiné rail-route ».
Stratégie augmentée
Sur la même longueur d’onde, les trois responsables se sont retrouvés en septembre dernier dans une réunion de la ville, « censée être une consultation, en fait juste une information », pointe Jean–Luc Delabre. Et, en accord avec leurs présidents, également associés au groupement national des transports combinés (GNTC), ils organisent la réplique. « Nous avons aussi contacté la fédération du BTP, le Medef ou les commerçants de la Courtine, complète Nathalie. A trois, notre analyse s’est réellement enrichie. Nous avons envisagé différents scénarios, une piste juridique, par exemple ».
Selon Jean-Marc Montagnac, « ce partage a permis de construire une réaction constructive, gardant toujours un dialogue avec la ville sans jamais lâcher nos objectifs ». Et, mentionne Jean-Luc Delabre, « tout en étant plus riche de nos réseaux respectifs et plus visible dans les médias ». Résultat, cette « stratégie augmentée », comme la nomme Nathalie Lutman, a permis aux trois fédérations « de parler d’une seule voix à chaque étape, face à chaque interlocuteur, de penser à l’intérêt de la branche » et, certainement, d’être mieux entendus.
Rejet du projet « en l’état »
Début novembre, le préfet du Vaucluse Thierry Suquet, constate ainsi dans un communiqué « l’absence de consensus nécessaire au déploiement du dispositif ». Il rappelle « l’obligation de tenir compte de la vocation des routes à grande circulation » à assurer « la desserte économique du territoire », en particulier, pour ce qui concerne la rocade, de « garantir un accès fluide à la zone d’activités de Courtine et au terminal de Champfleury »... Et, il émet « un avis défavorable en l’état au projet d’arrêté » que la mairie d’Avignon lui a transmis le 21 octobre et invite l’ensemble des parties prenantes à poursuivre la concertation.
Si le projet est « en stand-by », les trois organisations restent néanmoins attentives. « Nous avons écrit une feuille de route où la mobilisation pouvait aller crescendo », pointe Jean-Luc Delabre, ajoutant que « cette dynamique peut se révéler intéressante au plan local, face à d’autres interdictions de circuler prises par les collectivités territoriales, par exemple », voire dans le cadre des municipales, sur des dossiers locaux.