« France Benne représente 30 ans de croissance, de résistance et de résilience. On pourrait finalement appeler cette période les « 30 Glorieuses » », a résumé Patrice Fontan (Transports Fontan), président de France Benne, lors du séminaire du groupement qui s’est déroulé du 6 au 8 juin à Bordeaux. C’est à Bordeaux que France Benne a réuni cette année ses adhérents pour fêter ses 30 ans. « À sa création, le 3 avril 1995, France Benne comptait 12 membres, les 12 membres fondateurs », précise Patrice Fontan qui a été renouvelé à la présidence du groupement pour un mandat de quatre ans lors de l’assemblée générale en avril dernier. Objectifs de cette union entre transporteurs : pouvoir proposer une alternative d’offre de transport de vrac face aux grands groupes, de travailler en équipe sur des projets et des valeurs communs, d’échanger du fret de manière sécurisée et de mutualiser les achats. 30 ans plus tard, toujours aligné sur ces mêmes axes, France Benne regroupe 117 adhérents, dont 87 actionnaires, et compte bien assurer sa pérennité et le développement de ses adhérents dans une conjoncture pourtant difficile. « Il y a 30 ans, nous étions des artisans, a souligné Patrice Fontan. Ce n’est plus le cas. Le groupement a été d’un grand soutien, notamment dans les moments les plus difficiles. Notre ambition est désormais de construire de nouveaux projets sur les bases des transporteurs fondateurs du groupement. » En effet, force est de constater que le groupement a été un atout gagnant pour les entreprises adhérentes, qui, en moyenne, sont passées d’un chiffre d’affaires de 7M€ à 9,5M€ en 10 ans. Dans le même temps, la cellule commerciale de France Benne est passée de 0 à 22M€. France Benne apparaît ainsi comme « un prolongement de l’exploitation de chaque adhérent », a défini Didier Ramette, président des Transports Ramette, qui fait partie des membres fondateurs et était président du groupement de 2011 à 2023.
Au cours de l’AG qui s’est tenue en avril, la composition du bureau qui comprend six membres a été au cœur des discussions. Tout d’abord, le renouvellement à la présidence de Patrice Fontan a été validé. Odile Benoît (Transports Blondel-Voisin) a rejoint le bureau, succèdant ainsi à Jean-Yves Piron (Transports Piron). Trois autres mandats ont été renouvelés, ceux de Christian Poublan, dirigeant de Bigorre Services, de Mathurin Castan (sociétés TIT, TAF et TZP) et de Christian Colinet (Transports Colinet). Enfin, celui de Lionel Mahé (SGT) est toujours en cours.
Cette année, quatre nouvelles entreprises ont rejoint le groupement : les Transports Lambert (61), Sotracom (74), Morin Transports (26) et Liebart (51). Les candidatures que étudiées par le groupement répondent aux critères de dynamique de développement du maillage territorial et aux valeurs fondamentales existantes au sein du réseau France Benne. En matière de critères, la personnalité du chef d’entreprise, en particulier son éthique et sa propension au travail coopératif et l’entraide, sont étudiées. Si le groupement cible des sociétés avec un parc d’une vingtaine de véhicules minimum, il veille aussi à ne pas intégrer des groupes d’une dimension trop importante pour éviter que cela desserve les intérêts de l’ensemble des adhérents. Il existe des cas particuliers, comme lorsqu’une petite entreprise est reprise par un grand groupe. Il n’y a alors pas de sortie systématique du groupement qui réfléchit à l’intérêt de conserver la société au sein de France Benne.
Des projets
Alors que le métier fait face à des chargeurs qui se massifient, le groupement trentenaire a encore aujourd’hui tout son sens pour les transporteurs de vrac qui gagnent en visibilité et en force commerciale. « Nous avons des appels d’offre de clients qui proposent 10000 lignes, indique Patrice Fontan. Dans ce cas de figure, l’adhérent tout seul ne pourrait être que sous-traitant. France Benne représente un grand intérêt pour rester dans la course. » La tendance à la massification devrait se poursuivre, avec notamment « l’IA qui devrait libérer le business international, notamment parce que la langue ne sera plus un obstacle », souligne Christian Colinet, dirigeant de Transports Colinet (25).
Concernant les sujets technologiques, l’évolution des outils en SaaS est la première problématique sur laquelle le groupement compte se pencher. Il faut en effet que les outils des adhérents soient compatibles. « Il existe beaucoup de solutions de TMS, témoigne Mathurin Castan, dirigeant des sociétés TIT, TAF (81) et TZP (13). Les exploitants passent de plus en plus de temps à gérer les requêtes sur certaines commandes. Et, parfois, certains donneurs d’ordre imposent leur système. » Par ailleurs, du côté de la RSE, le groupement planche sur des moyens qui permettraient d’avoir des arguments face aux chargeurs demandeurs de transport décarboné, peut-être sous forme de charte pour les adhérents, avec des solutions qui permettraient d’accompagner les adhérents dans leurs démarches environnementales. Sur ce point toutefois, Romain Busque, directeur commercial de France Benne, note une moindre demande des clients sur ce critère, le prix devenant le sujet principal en cette période de conjoncture assez morose.
La cellule commerciale de France Benne a profité de l’événement pour mettre en avant les atouts pour la pérennité du groupement dans les années à avenir. L’étude menée par l’équipe commerciale démontre que l’image, l’identité et le logo France Benne, reconnus sur la route et chez le chargeur sont efficaces. « Ils nous sollicitent pour notre engagement, notre puissance », indique l’équipe. France Benne apparaît comme un important challenger du vrac national, tout en ayant un ancrage local très fort grâce à ses adhérents. Il est également comme un levier de négociation pour les adhérents. Des points de vigilance sont aussi relevés, comme la concurrence de grands groupes familiaux plus anciens et homogènes sur le territoire.
Conjoncture
La conjoncture a été l’un des sujets les plus abordés au cours de ce séminaire bordelais. Si la plupart des adhérents constatent une activité assez soutenue dans la filière, la difficulté à maintenir les tarifs inquiète fortement les transporteurs. « Souvent le client souffre aussi, témoigne un adhérent. Mais nous arrivons à un stade où nous ne pourrons plus continuer si nous ne parvenons pas à répercuter les hausses de coûts. Devons-nous ajuster notre structure ? Ce qui est sûr, c’est que lorsque l’activité reprendra, le client risque de se retrouver sans moyen de transport ! » À cela s’ajoutent des coûts que le client tend à minorer : « Par exemple, le client pense souvent à tort que le lavage de citernes ne coûte pas cher, précise Bruno Cléton, dirigeant des Transports Cléton. La réglementation impose des normes que nous devons suivre et cela a un coût. »
France Benne en cinq dates clés
- 1995 : création de France Benne.
- 2011 : le pôle Transport Centralisé voit le jour avec une entité unique qui centralise les fonctions commerciales, logistiques et administratives dans le cadre de contrats négociés avec des clients chargeurs, agissant pour le compte et grâce aux ressources mutualisées de ses adhérents.
- 2017 : le groupement atteint les 100 adhérents.
- 2019 : le conseil de surveillance évolue en conseil d’administration.
- 2025 : une filiale est créée, France Benne Développement, détenue à 100 % par la coopérative France Benne. Cette dernière a pour vocation de guider les transporteurs dans divers projets, à commencer par la reprise d’entreprise, mais aussi d’autres domaines comme la formation.
Focus sur la cybersécurité
Fournisseurs, chargeurs, sites d’entreposage… L’entreprise de transport se trouve en relation avec pléthore d’interlocuteurs à travers de multiples outils connectés, faisant d’elle une cible vulnérable aux cyberattaques. Pour sensibiliser ses adhérents, France Benne a proposé une conférence sur le sujet. « 90% des attaques proviennent des mails », prévient Olivier Brousseaud, de la société Aloa (groupe Adecia). L’expert en cybersécurité préconise plusieurs mesures à mettre en place. Ne pas mélanger les mails professionnels et les mails personnels, avoir une couverture avec une assurance, réfléchir avant toute interaction avec la machine… Mais aussi sensibiliser l’ensemble des salariés.
Une attaque peut très rapidement coûter très cher à l’entreprise. « On parle d’une perte moyenne de 80000€, mais il y a aussi à prendre en compte d’autres coûts comme les conséquences sur l’exploitation qui peut être ralentie voire arrêtée plusieurs jours ou semaines », souligne Olivier Brousseau. En cas de vol de données, « il y a obligation de déclarer la fuite à la CNIL, poursuit-il. Et, en cas de plainte, l’amende peut être très élevée. »