Cartel des camions : premières indemnisations prononcées en France

Le tribunal de commerce de Bordeaux a condamné Daimler à verser 221 000 € au négociant et transporteur de produits pétroliers Mendiboure.

Crédit photo Mendiboure
La décision rendue le 3 octobre par le tribunal de commerce de Bordeaux est historique. Dans l’affaire dite du « cartel des camions », elle a condamné le constructeur Daimler à verser 221 000 € à la société basque Mendiboure. Pour les transporteurs engagés dans une procédure d’indemnisation, cette décision pourrait faire jurisprudence.

Négociant et transporteur de produits pétroliers, Mendiboure rayonne sur le Pays basque et les Landes depuis son siège à Itxassou dans les Pyrénées-Atlantiques. Représentée par le cabinet Lex-Port, la PME d’une trentaine de millions d’euros de chiffre d’affaires, a engagé une procédure au titre des surcoûts payés dans l’affaire dite du « cartel des camions ». Rendu le 3 octobre, le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux a retenu 28 camions achetés par Mendiboure entre 1997 et 2011 ; période au cours de laquelle la Commission européenne a épinglé 7 constructeurs de véhicules industriels pour entente. Sur cette flotte, la juridiction commerciale a reconnu l’existence d’un préjudice économique pour le transporteur-négociant à hauteur de 211 000 €. Soit une indemnité de 7 900 € par véhicule. Les expertises menées par Lex-Port dans le cadre de la procédure ont estimé le surcoût moyen à 9 % sur le prix des camions.

Rappel des faits

En 2016, la Commission européenne a condamné 6 constructeurs de camions pour entente illégale sur la période comprise entre 1997 et 2011. Cette entente portait sur « des accords et pratiques concertés sur les prix de vente des camions, le calendrier relatif à l’introduction des technologies d’émission imposées par les normes Euro III et IV, et sur la répercussion des coûts de ces technologies sur les clients » selon la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Pour ces faits, une amende record de 3,8 Mds€ avait été infligée en 2016 à DAF, Daimler, Iveco, Volvo Trucks et Renault Trucks. MAN avait échappé à la sanction après avoir accepté de coopérer avec la justice européenne. Ce jugement avait ouvert aussi aux entreprises un recours en dommages et intérêts à l’encontre des 6 constructeurs pendant 5 ans. Seule condition pour en être éligible : avoir acheté, loué ou pris en leasing des camions neufs de 6 tonnes et plus entre 1997 et 2011.

Procédure relancée jusqu’en janvier 2029 a minima

Seul Scania avait contesté le verdict des autorités européennes et son amende de plus de 880 M€. Le 1er février 2024, la CJUE a rejeté son dernier recours. En plus de confirmer la participation de la marque au Griffon au cartel et l’obliger à payer son amende, la Cour a réouvert aux entreprises une nouvelle période de 5 ans pour réclamer des dommages et intérêts auprès des constructeurs condamnés aux mêmes conditions d’éligibilité. Soit jusqu’à fin janvier 2029 sauf questions de procédure auprès de la CJUE qui prolongeraient cette échéance. « La Cour a estimé que les constructeurs étaient responsables solidairement des dommages causés par l’ensemble du cartel », souligne Juraj Siska. « Cette nouvelle période bénéficie aux entreprises qui n’ont pas encore engagé des procédures contre le cartel », précise le directeur du fonds européen de financement des contentieux LitFin France & Benelux.

Deux démarches possibles

Les transporteurs routiers disposent aujourd’hui de deux voies pour obtenir réparation dans l’affaire du « cartel des camions ». La première démarche, la plus courante, consiste à rejoindre une procédure contentieuse afin de réclamer des dommages et intérêts auprès des constructeurs condamnés. Cette action peut aboutir à un accord amiable ou à une décision de justice. Dans ce cadre, le financement de la procédure peut être entièrement pris en charge par un établissement spécialisé sur la base du principe « no win, no fee » : le transporteur n’avance aucun frais et ne paie qu’en cas de succès, sous forme d’une commission versée à l’établissement sur les sommes obtenues. Cette option permet de participer aux actions collectives en cours, tout en évitant le risque financier. La récente décision du tribunal de commerce de Bordeaux, d’environ 7 900 € par camion, illustre le potentiel d’indemnisation avec ces procédures.
La seconde démarche consiste à céder sa créance à un établissement spécialisé. Le transporteur perçoit alors immédiatement une somme forfaitaire - en moyenne 1 000 € par camion éligible - et sort définitivement de la procédure. « Ce mécanisme permet d’obtenir un paiement garanti avant toute décision de justice, quelle que soit l’issue finale du contentieux. Il offre une liquidité immédiate et une sécurité totale, là où les procédures judiciaires peuvent durer plusieurs années et aboutir à des montants variables », explique Juraj Siska. En d’autres termes, l’établissement prend le risque à la place du transporteur : le règlement est immédiat pour ce dernier puis l’établissement supporte l’aléa judiciaire.
Pour LitFin qui propose les deux démarches, « le choix revient au transporteur en fonction de sa stratégie, de son besoin en trésorerie ou des indemnités en jeu ». Dans les deux cas, le transporteur n’a aucun frais à avancer ou à payer, et ne prend aucun risque.
 

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