L’intelligence artificielle n’est désormais plus une notion abstraite pour le transport et la logistique. Elle apparaît progressivement à travers différentes tâches sur l’ensemble des postes du secteur. « Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir s’il faut de l’intelligence artificielle dans le secteur mais comment on peut la rendre humaine. Il faut la voir comme une opportunité et non comme une menace » a souligné Alexis Gibergues, président de l’OTRE, qui intervenait dans le cadre de la 59e Université d’automne de l’AETL, organisée le 6 décembre à Paris, dans les locaux de l’Aftral. L’impact de l’IA est déjà concret dans le TRM : « Elle permet de diminuer les coûts de transport et de gagner en productivité », soutient Alexis Gibergues qui ajoute que les transporteurs s’en emparent déjà pour de nombreuses tâches : « Grâce à l’IA, des patrons de PME répondent aux appels d’offres auxquels ils n’avaient auparavant pas accès. Ils s’en servent aussi comme outil juridique ou encore pour le recrutement, pour repérer par exemple les mots clés d’un CV. »
Un profil comportemental
Pour Frédéric Hartstein, président de LID Consulting, cabinet spécialisé dans le recrutement de cadres en transport, logistique et métiers de la supply chain, la maîtrise de l’IA deviendra un profil comportemental et sera un prérequis. « Pour l’instant, les recruteurs n’expriment pas de demande particulière sur ce point, mais ça viendra. Et ceux qui la maîtriseront auront les postes », assure-t-il. Le spécialiste du recrutement distingue quatre critères qui composeraient cette « soft skill » : la clarté cognitive, pour par exemple bien renseigner et cadrer le contenu du prompt ; l’esprit critique, pour repérer les biais de l’IA ; l’adaptabilité face aux nouveautés et mises à jour régulières ; et la capacité à une collaboration homme-machine.
Des formations pour limiter les risques
De fait, une grande partie des salariés utilisent déjà l’intelligence artificielle, soit à travers les outils qui l’intègrent, soit à travers des solutions plus diverses, parfois sans que l’aval de l’entreprise, générant des risques de sécurité. « Très peu ont suivi des formations certifiantes », déplore Pauline Suire, directrice de la pédagogie et offre de formation à Promotrans. Soulignant l’importance de l’esprit critique face aux biais de l’IA, elle ajoute que ces formations permettraient d’interagir en sécurité avec la technologie en sachant poser des limites et réagir en cas, par exemple, de résultat étrange après une analyse de données. Les formations pourraient aussi être personnalisées selon les outils d’IA utilisés sur des postes en particulier : les IA d’organisation pour les exploitants, d’analyses et tris de données pour les gestionnaires d’entrepôts ou encore d’optimisation de flux pour les affréteurs.
Création d'emplois sur les fonctions support
Dans les prochaines années, sous l’effet de l’intelligence artificielle, 85 millions d’emplois vont disparaître, mais 92 millions devraient apparaître, indique Toufik Abdelmalek, HR digital transformation & HRIS manager chez Geodis. « L’intelligence artificielle va transformer les compétences et même remplacer certains emplois, au moins pour certaines tâches, par exemple celles qui sont répétitives, comme pour les préparateurs de commandes », précise Grégory Mortreux, responsable du pôle formations supérieures à l’Aftral. En revanche, les emplois créés concerneront les fonctions support : paramétrages d’outils comme les TMS et WMS, analyses de data, maintenance de chaînes automatiques… Cette transformation devra être accompagnée par des formations pour développer deux types de compétences, d’abord techniques, liées au métier pour utiliser l’IA sur des outils spécifiques, puis humaines pour accompagner le changement auprès des équipes, arbitrer, suivre l’éthique ou encore assurer la sécurité pour éviter les cyberattaques et… ne pas diffuser d’informations confidentielles.